204 - Sacré Coeur de Digne les bains
Rappel du contexte
Après les élections présidentielles de 2002, le Ministre de l’Intérieur SARKOSY met en place sa politique de « répression préventive » qui se traduit par la fixation de quotas d’interpellations à atteindre, l’augmentation et l’accélération des décisions de placement en détention provisoire, l’abandon de la police de proximité...
Le résultat ne se fera pas attendre :
Augmentation de 53 % des placements en garde à vue en moins de 5 ans.
Progression du nombre de détenus qui passe de 56 000 environ fin 2001 à plus de 60 000 fin 2003 dont plus de 30 % sont placés en détention provisoire, record européen… pour le pays des droits de l’homme !!!
Déroulement de l'affaire
Après les vacances de la Toussaint 2002, un interne de 5 ème (13 ans ½) refuse de rejoindre l’établissement du sacré cœur où il est scolarisé depuis septembre.
Il justifie son attitude par le fait qu'il a été violé dans le dortoir du lycée !
Conduit à la gendarmerie par ses parents, il fait 4 déclarations successives entre le 19 novembre et le 13 décembre 2002.
Dénonçant, lors de la première audition, un viol par 3 lycéens dans le couloir de son dortoir, avant l’extinction des lumières alors que les internes circulent dans le dortoir, il progressera, au fil des auditions, dans l’horreur et dans les contradictions...
Bilan final après quatre auditions d’un mythomane pervers:
En un mois et demi d’internat, il aurait été confronté à 8 soirées d’enfer pendant lesquelles il aurait été frappé sévèrement et violé à maintes reprises par une dizaine de lycéens qu’il désigne sur les photos qu’on lui présente. Il aurait même subi une tentative de meurtre par défenestration.
Tout cela devant témoins sans qu'un seul dénonce les faits…
Au cours de la quatrième audition, considérant peut-être qu’il n’ avait pas été assez convaincant, il dénonce également 3 surveillants qui auraient participé ensemble à certaines agressions avec la complicité active et passive des 27 internes du dortoir dans lequel il couchait...
Mise en route de la machine infernale
Le 17 décembre 2002, 4 lycéens dont 3 mineurs et un surveillant sont placés en garde à vue.
Début de galère…
Ils crient leur innocence mais, comme d’habitude dans ce type d’affaires, ils ne sont pas entendus …
La vérité est pourtant facile à établir par un travail de simple vérification auprès des témoins !
Le jour même du placement en GAV des 5 "présumés coupables", trois internes, camarades du calomniateur, couchant dans sa chambre et nommés par lui même comme témoins, sont entendus.
Ils affirment qu’ils n’ont constaté aucune agression dans le dortoir.
Mais pour les enquêteurs de la gendarmerie de Digne les bains, cela ne semble pas représenter un élément à décharge suffisant!
Il reste alors 20 internes du dortoir à entendre et 2 surveillants pour confirmer ou infirmer.
Travail, hélas, trop fastidieux pour une enquête qui se veut rapide et efficace !!
Il est plus facile de procéder à la torture psychologique des 5 gardés à vue par application directe du théorème ROYAL : «L’enfant ne ment jamais».
Dès la fin de la GAV, les «coupables sélectionnés » sont présentés au juge d’instruction.
Ce dernier s’empresse de les mettre en examen pour viols répétés en réunion sur mineur de moins de 15 ans .
Placés dans un premier temps, sous contrôle judiciaire, les 5 « coupables désignés » sont immédiatement repris en main par le Procureur qui trouve cette décision trop laxiste !
Bien entendu, la chambre d’instruction lui donne raison, se réserve le contentieux de la détention et envoie les «coupables» en cabane pour trouble exceptionnel et persistant à l’ordre public !
Le fiasco est en route…
Les enquêteurs se disposent, enfin, à entendre les 20 internes du dortoir restant à interroger.
Il leur faudra 2 mois pour effectuer tout ce travail !
Retour de boomerang peu glorieux pour une machine infaillible...
Les internes, confirmant les dires des 3 premiers élèves entendus le 17 décembre, sont unanimes pour affirmer qu’il n’y a jamais eu d’agression dans le dortoir et que le surveillant incarcéré n’a jamais eu une parole ou un geste déplacés envers quiconque.
Par ailleurs, les experts médicaux, nommés par le juge d'instruction, relèvent les contradictions évidentes et grossières du calomniateur, contradictions jamais signalées par les enquêteurs qui ont, pourtant, recueilli, eux mêmes, les paroles du calomniateur !
Après examen médical, ces experts certifient qu’il n’existe aucune séquelle corporelle alors que des séquelles graves auraient dû persister compte tenu de la violence et de la répétition des scènes décrites.
18 mois pour se libérer des griffes de la machine...
Les 5 Innocents Injustement Accusés seront libérés progressivement par la chambre d’instruction mais les dégâts sont faits: 35 jours à 3 mois de tôle offerts par la Bonne Conscience à la crédibilité d'un calomniateur pervers… de quoi briser leur jeunesse par des traumatismes psychologiques profonds.
Placés à nouveau sous contrôle judiciaire, ils devront encore faire preuve de patience pendant plus de 18 mois avant d’obtenir un non-lieu général, confirmé par la Cour d’Appel, avec reconnaissance de l’erreur de mise en examen pour le surveillant.
Dignité de la Justice bafouée...
Si prompts à incarcérer arbitrairement 5 innocents, les défenseurs de l'ordre public n'assumeront même pas, par simple dignité et respect de la Justice, la responsabilité de convoquer le calomniateur pervers pour le réprimander et le faire suivre sur le plan social !
Faut-il en rire ?